#11 Martin PARR par Julien Kors

Chaque semaine une œuvre ou un artiste-auteur vous est présenté par un membre du groupe facebook Poitiers Photo Vienne.
23 juin 2021

Dans la longue liste des photographes que je pourrais présenter, en voici un que j'ai choisi de montrer en premier, sans doute parce que je trouve très ironique de publier sur un réseau social le travail d'un photographe dont l'essentiel de l'œuvre constitue une critique de la société de consommation et l'usage des photos faites par les amateurs :

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Voici le vocabulaire qui caractérise le travail de ce photographe :
Anglais, Couleurs criardes, Tourisme de masse, Société de consommation, Gros plans, Kitsch, Classes sociales.
Et aussi: plages bondées, couples déprimants, maillots de bain peu saillants, garden parties avec chapeaux, assiette de pudding dégoulinantes…

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Né à Epsom dans le Surrey en 1952, Martin Parr, initié à l’amour de la photo par un grand-père passionné, étudie à la Polytechnic school de Manchester.

Ses premiers reportages, en noir et blanc, au milieu des années 80, réalisés dans le nord de l’Angleterre traitent déjà de ce qui sera son thème pour les décennies suivantes : capter les us et coutumes de ses concitoyens.
Puis vient Last Resort (1986), série (en couleurs) sur les vacanciers anglais à Brighton, qui fait beaucoup parler de lui et amorce son thème chéri :
LES VACANCES.

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En 1994, et suite à bien des débats, il intègre l’agence Magnum. Cependant, ses images de couples qui s’ennuient (Bored People), de bibelots souvenirs et de gros américains en villégiature ne sont pas du goût de tous, au sein de la plus prestigieuse agence photojournalistique.
Parr ne couvre pas les guerres, les famines et les exodes de peuples désespérés, il s’attaque même plutôt aux maux inverses :
La surconsommation en Occident. La richesse insolente. L’opulence débordante. La globalisation. La standardisation des modes de vie et des rêves.
Les petits détails individuels deviennent sublimes et absurdes :
un chapeau à plumes de paon, un bijou de portable, une chemise hawaïenne, le plissé d’un lourd rideau satiné…
Passé au microscope et avec le sens satirique de Parr, le kitsch retrouve ses lettres de noblesse.

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Il présente l’étalage de nos petites mises en scène sociales sous les néons sans pitié du supermarché de l’Occident.
Joyeux et effrayant à la fois, devant ce «petit théâtre de l’ordinaire», on hésite entre le rire, le dégoût ou le désespoir.

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Comme l’écrit le photographe américain Alec Soth, Martin Parr est le Jay-Z de la photo documentaire : On retrouve son influence partout. L’influence de Parr est globale, et souvent inconsciente.
Dès qu’on photographie un couple de japonais posant devant le Louvre, même sans le savoir, on cite Martin Parr. Dès qu’on met son flash en plein jour, dès qu’on sature un peu nos couleurs, dès qu’on immortalise notre cheeseburger…
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Et plus les images nous submergent -« la propagande » comme il le dit lui-même-, plus voyager à l’autre bout du monde devient rapide, plus on expose les photos de nos soirées et de nos ongles vernis sur les réseaux sociaux plus le « monde Parr » semble s’étaler.
Photojournaliste sociologue, Parr nous décrypte avec juste la distance qu’il faut.

« Le fait de nous prendre en photo dans un site touristique est devenu très important car il nous assure que nous appartenons à un monde reconnaissable », écrit-il sur son blog.
Il a bien conscience lui aussi d’être un occidental consommateur et le satiriste ici ne prend jamais ses sujets de haut. C’est peut-être pour ça que ses portraits de cupcakes ont un intérêt que les autres n’ont pas…

Lien vers le site de Martin Parr : www.martinparr.com/

Post-Scriptum : Ce texte, que j'ai adapté, est extrait d'un article publié sur le site Lense.fr, dont voici le lien : www.lense.fr/news/revisons-nos-classiques-martin-parr/

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